1923 |
Bulletin communiste, n� 15, 12 avril 1923. |
�uvres - Mars 1923
Une explication n�cessaire avec les syndicalistes‑communistes
Le pr�sent article, suscit� par quelques �crits du camarade fran�ais Louzon, a �t� compos� peu apr�s le 4� congr�s. Mais nous avions alors � l'ordre du jour la lutte contre la droite, contre les dissidents de la derni�re fourn�e, les Verfeuil, Frossard et consorts. Dans cette lutte nous avons march� et continuons de marcher la main dans la main avec les syndicalistes‑communistes, et c'est pourquoi j'ai ajourn� la publication de cet article. Nous avons la ferme conviction que notre union avec les r�volutionnaires du syndicalisme restera pleine et enti�re. L'entr�e de notre ami Monatte dans le parti a �t� pour nous une grande joie : les hommes de cette trempe sont n�cessaires � la r�volution. Mais l'on ne saurait, �videmment, acheter un rapprochement au prix de la confusion id�ologique. L'�puration et la consolidation du parti fran�ais ont consid�rablement progress� durant les derniers mois. Aussi pouvons‑nous nous expliquer tranquillement et amicalement avec les camarades aux c�t�s desquels nous aurons � travailler et � combattre [1].
Dans une s�rie d'articles, le camarade Louzon, sur la question extr�mement importante des rapports entre le parti et les syndicats, adopte et motive une position divergeant radicalement de celle de l'Internationale communiste et de la doctrine marxiste. Le d�vouement de Louzon � la cause de la r�volution prol�tarienne � �t� et est attest� par des camarades fran�ais dont l'opinion est pour moi d'un grand poids [2]. Par suite, il est d'autant plus n�cessaire de s'�lever contre les points de vue erron�s qu'il soutient dans une question aussi importante.
Le camarade Louzon d�fend l'� ind�pendance � compl�te et absolue des syndicats. Contre quoi ? Evidemment contre certaines atteintes. De qui ? Evidemment du parti. L'autonomie syndicale est d'une n�cessit� incontestable, mais Louzon lui attribue un sens absolu, presque mystique. Ce faisant, il se r�f�re, compl�tement � tort, � Marx.
Les syndicats sont, dit Louzon, la classe ouvri�re elle-m�me. Quant au parti, il n'est que le parti. La classe ouvri�re, dans son ensemble, ne peut �tre subordonn�e au parti. Il ne peut m�me y avoir entre eux �galit�. � La classe ouvri�re est par elle-m�me son but. � Quant au parti, il ne peut qu'�tre le serviteur de la classe ouvri�re ou lui �tre subordonn�. Par suite, il ne peut � annexer � la classe ouvri�re. La repr�sentation r�ciproque de l'Internationale communiste et de l'Internationale syndicale rouge qui existait jusqu'aux derniers congr�s mondiaux de Moscou signifiait, d'apr�s Louzon, la reconnaissance de l'�galit� des droits et de l'�quivalence de la classe et du parti. Maintenant, cette repr�sentation r�ciproque est supprim�e. Par l� m�me, le parti est ramen� � son r�le de serviteur ou de subordonn�. Ce que le camarade Louzon approuve. Telle �tait �galement, soi‑disant, la position de Marx dans cette question. C'est pourquoi Louzon interpr�te la suppression de la repr�sentation r�ciproque entre les deux organismes des syndicats et du parti comme une renonciation aux erreurs � lassalliennes � et social‑d�mocrates et un retour aux principes de Marx.
Voil� ce que dit, en substance, Louzon dans un article publi� le 15 d�cembre, dans la Vie ouvri�re. Ce qui frappe le plus dans cet article, ainsi que dans d'autres analogues, c'est que l'auteur semble fermer consciemment et herm�tiquement les yeux sur ce qui se passe en France. On pourrait croire que l'article en question a �t� �crit par un habitant de Sirius. Autrement, comment comprendre l'affirmation de Louzon que les syndicats sont � la classe ouvri�re elle‑m�me � ? De quel pays exactement parle Louzon ? S'il s'agit de la France, les syndicats, comme on le sait, sont encore loin, par malheur, d'y co�ncider avec l'ensemble de la classe ouvri�re ou m�me avec la moiti�... Par suite des manceuvres criminelles des syndicalistes r�formistes, aid�s en cela par certains anarchistes, l'organisation syndicale est scind�e en deux parties. Chacune ne groupe pas plus de 300 000 ouvriers. Il s'ensuit que ni l'une ni l'autre prise � part, ni m�me toutes les deux ensemble, ne peuvent �tre identifi�es avec l'ensemble du prol�tariat fran�ais. jusqu'� pr�sent, elles n'en groupent qu'une portion insignifiante. En outre, il ne faut pas oublier que la C.G.T. et la C.G.T.U. ont une politique diff�rente. La premi�re a une politique de conciliation, la seconde, une politique de lutte r�volutionnaire. Le camarade Louzon soutient la C.G.T.U. contre la C.G.T., et c'est tr�s bien. 'Bien plus, au sein de la C.G.T.U. m�me, le camarade Louzon repr�sente une tendance d�termin�e. Comment accepter, apr�s cela, l'assertion que la classe ouvri�re, co�ncidant soi‑disant avec l'organisation syndicale, est par elle‑m�me son but ? Par qui et de quelle fa�on la classe ouvri�re fran�aise exprime‑t�elle ce but ? Par l'organisation de Jouhaux ? Evidemment non. Par la C.G.T.U. ? Mais cette organisation, qui a d�j� de grands services � son actif, ne co�ncide pas encore, h�las ! avec la classe ouvri�re. Enfin, pour tout dire, il n'y a pas si longtemps que la C.G.T.U. �tait encore sous la direction du groupe du � pacte �. Maintenant, elle est sous l'influence des syndicalistes communistes. Durant laquelle de ces deux p�riodes la C.G.T.U. exprimait‑elle le plus exactement les int�r�ts de la classe ouvri�re ? Et comment le v�rifier ? Si l'on veut le v�rifier en se reportant � l'exp�rience internationale de notre parti, on commet, d'apr�s Louzon, un p�ch� mortel, car par‑l� m�me on met le parti � au‑dessus de la classe � et on lui fait d�cider de la politique n�cessaire � la classe. Si l'on s'adresse � la classe elle‑m�me, dans son ensemble, on la trouve, h�las ! dans un �tat de division, d'impuissance et de mutisme. Les diff�rentes parties de la classe organis�es dans diff�rentes conf�d�rations, les diff�rents syndicats d'une seule et m�me conf�d�ration, les diff�rents groupes d'un seul et m�me syndicat, nous donneront des r�ponses diff�rentes ; quant � la majorit� �crasante du prol�tariat qui reste en dehors des conf�d�rations, elle s'abstiendra, pour le moment du moins, de r�pondre .
En aucun pays il n'existe d'organisation professionnelle qui coincide avec l'ensemble de la classe ouvri�re. Mais, dans d'autres pays, il existe, au moins, des syndicats groupant une partie consid�rable de la classe ouvri�re. En France, il n'en est pas ainsi. Si Louzon d�nie au parti le droit d' � annexer � (en somme, qu'est‑ce que cela signifie exactement ?) la classe ouvri�re, sur quoi se base‑t‑il pour conf�rer ce droit au syndicalisme ?
� Mais, dira peut‑�tre le camarade Louzon, si l'organisation syndicale fran�aise est maintenant extr�mement faible, nous ne doutons nullement de son d�veloppement et de sa victoire d�finitive. � A cela nous r�pondrons : � La chose est incontestable, nous aussi nous en sommes convaincus, mais il n'est pas moins certain �galement que le parti, lui aussi, gagnera la confiance absolue de l'immense majorit� de la classe ouvri�re. � Pour le parti comme pour les syndicats, il s'agit non pas d' � annexer � le prol�tariat ‑ c'est bien � tort que Louzon emploie la terminologie habituelle � nos adversaires dans leur lutte contre la r�volution ‑ mais de gagner sa confiance, et l'on ne peut y arriver que par une tactique juste, v�rifi�e � la lumi�re de l'exp�rience. O� donc, et par qui cette tactique est‑elle �labor�e consciemment, d'une mani�re critique et m�thodique ? Qui la propose � la classe ouvri�re ? Elle ne tombe pas du ciel, elle n'�mane pas non plus de � la classe ouvri�re elle-m�me �. Voil� la question � laquelle, apparemment, le camarade Louzon n'a pas r�fl�chi.
� La classe ouvri�re est par elle‑m�me son but. � D�gag�e de son enveloppe mystique, cette phrase doit signifier que les buts historiques du prol�tariat sont d�termin�s par sa situation sociale en tant que classe, par son r�le dans la production, la soci�t� et l'�tat. Cela est absolument incontestable. Mais cela ne nous donne absolument rien pour l'intelligence de la question sp�cifique que nous �tudions en ce moment : de quelle fa�on le prol�tariat arrive‑t‑il � la compr�hension subjective du but historique conditionn� par la situation objective ? Si le prol�tariat dans son ensemble �tait capable d'atteindre directement son but historique, il ne faudrait ni parti ni syndicats : la r�volution prol�tarienne viendrait au monde en m�me temps que le prol�tariat lui‑m�me. En r�alit�, le processus par lequel le prol�tariat arrive � la conception de sa mission historique est tr�s long et extr�mement douloureux, plein de contradictions internes. Apr�s une longue lutte, des �preuves, des fautes, apr�s une accumulation d'exp�rience, la conception juste des voies et des m�thodes de d�veloppement p�n�tre dans le cerveau des meilleurs �l�ments qui en forment l'avant‑garde. Cela se rapporte dans l'ensemble non seulement au parti, mais aussi aux syndicats. Ces derniers �galement commencent par un petit noyau d'ouvriers actifs et ne se d�veloppent que progressivement, en conqu�rant, gr�ce aux fruits de l'exp�rience, la confiance des masses. Durant tout le cours de la lutte men�e par les organisations r�volutionnaires pour �tablir leur influence sur la classe, les id�ologues de la bourgeoisie opposent � la classe ouvri�re elle‑m�me � non seulement au parti de la classe ouvri�re, mais � ses syndicats, qu'ils accusent de vouloir annexer la classe ouvri�re. C'est ce que le Temps �crit � propos de chaque gr�ve. En d'autres termes, les id�ologues bourgeois opposent la classe ouvri�re en tant qu'objet � la classe ouvri�re en tant que sujet. Car ce n'est que par sa minorit� consciente que la classe ouvri�re devient peu � peu sujet de l'histoire. De la sorte, ce que le camarade Louzon dit contre la � pr�tention � du parti, s'applique �galement en entier � la � pr�tention � des syndicats ‑ particuli�rement en France, car le syndicalisme fran�ais, nous le r�p�tons, en tant qu'organisme et en tant que th�orie, a �t� et reste jusqu'� pr�sent un parti. C'est pr�cis�ment pour cela que, dans sa p�riode classique (1905‑1907), il est arriv� � la th�orie de la � minorit� d'initiative �, et non de � la classe ouvri�re elle‑m�me �. Qu'est�-ce qu'une minorit� d'initiative li�e par l'unit� de doctrine, sinon un parti ? Et qu'est‑ce, d'autre part, qu'une organisation syndicale de masses, sans une minorit� d'initiative directrice consciente, sinon une forme sans contenu ?
Le fait pr�cis�ment que le syndicalisme fran�ais �tait un parti a trouv� son expression dans la scission qui s'est produite lorsque des divergences de vues politiques se sont manifest�es dans son sein. Mais le parti du syndicalisme r�volutionnaire redoute la r�pugnance des masses fran�aises pour les partis en g�n�ral. C'est pourquoi le syndicalisme r�volutionnaire n'a pas pris le nom de parti et est rest� organiquement � demi constitu�. C'est un parti qui s'est efforc� de fondre ses cadres avec ceux du syndicat, ou tout au moins de trouver un voile dans le syndicat. De l� la subordination effective des syndicats aux pr�tentions de tendances, de fractions et m�me de coteries au sein du syndicalisme. De l� �galement le � pacte �, c'est‑�‑dire la caricature ma�onnique d'un parti au sein de l'organisation syndicale.
Et inversement. C'est pr�cis�ment l’Internationale communiste qui a men� une lutte acharn�e contre la scission du mouvement syndical en France, c'est‑�‑dire contre sa transformation effective en partis syndicaux. C'est pr�cis�ment l'Internationale communiste qui a mis au premier plan les objectifs historiques de la classe ouvri�re elle‑m�me et l'immense importance intrins�que de l'organisation syndicale au point de vue de ces objectifs. Dans ce sens, l'Internationale communiste, d�s le premier jour de son existence, a soutenu l'autonomie r�elle, vitale des syndicats, conform�ment � tout l'esprit du marxisme.
Le syndicalisme r�volutionnaire, qui, sous beaucoup de rapports, a �t� en France le pr�curseur du communisme contemporain, s'est born� � la th�orie de la minorit� d'initiative, autrement dit du parti, sans se transformer ouvertement en parti. Mais, par l� m�me, il a emp�ch� les syndicats de se transformer en organisation, sinon de � la classe ouvri�re elle‑m�me � (ce qui est impossible en r�gime capitaliste), du moins de masses importantes de la classe ouvri�re. Les communistes n'ont pas peur du nom de parti, parce que leur parti n'a et n'aura rien de commun avec les autres partis. Ce n'est pas un des partis politiques du r�gime bourgeois, mais la minorit� consciente, la minorit� d'initiative de la classe ouvri�re, son avant-garde r�volutionnaire. C'est pr�cis�ment pour cela que les communistes ne se couvrent pas ‑ dans le domaine de l'id�ologie non plus que dans celui de l'organisation ‑ de l'organisation syndicale, n'exploitent pas cette derni�re par des manœuvres de coulisse, ne la divisent pas lorsqu'ils sont en minorit�, ne g�nent en rien son d�veloppement autonome et l'aident de toutes leurs forces dans sa lutte. En m�me temps, le parti communiste se r�serve le droit de se prononcer sur toutes les questions du mouvement ouvrier, y compris le mouvement syndical, de critiquer la tactique syndicale et d'apporter ses propositions que l'organisation syndicale est libre d'accepter ou de refuser. Le parti s'efforce par l'action pratique de gagner la confiance de la classe, et avant tout de sa partie syndiqu�e.
Que signifient les citations de Marx produites par le camarade Louzon ? Marx �crivait, en effet, en 1868, que le parti ouvrier surgirait des syndicats. Mais il avait alors en vue principalement l'Angleterre, qui �tait en ce temps‑l� le seul pays poss�dant un capitalisme d�velopp� et des organisations ouvri�res importantes. Depuis lors, il s'est �coul� un demi‑si�cle. L'histoire, dans son ensemble, a confirm� le pronostic de Marx, en ce qui concerne l'Angleterre. Le parti ouvrier anglais a surgi en effet sur la base des trade‑unions. Mais Louzon croit‑il que le Labour Party, dans sa forme actuelle, avec les Henderson, Clynes et autres � sa t�te, puisse �tre consid�r� comme exprimant les int�r�ts de l'ensemble du prol�tariat ? Certes, non. Le Labour Party, en Grande‑Bretagne, trahit les int�r�ts du prol�tariat, dans la m�me mesure que la bureaucratie trade‑unioniste qui lui est identique, quoique, en Angleterre, pr�cis�ment, les trade-unions soient beaucoup plus proches de � la classe elle‑m�me � qu'en aucun autre pays. Mais, d'autre part, il est indubitable que l'influence communiste en Angleterre s'�tablira dans une large mesure par l'appareil du Labour Party, surgi des trade‑unions et qu'elle contribuera � l'accentuation de la lutte int�rieure entre la masse et les sommets de cette organisation, � l'expulsion de la bureaucratie tra�tresse, � la transformation et � la r�g�n�ration compl�te du Labour Party. Et nous appartenons, avec Louzon, � l'Internationale qui, englobant le petit parti communiste britannique, lutte contre la II� Internationale, s'appuyant sur le parti ouvrier anglais sorti des trade‑unions.
En Russie ‑ et la Russie dans le cadre des lois g�n�rales du d�veloppement capitaliste est l'antipode de la Grande�-Bretagne ‑ le parti communiste (anciennement social‑d�mocrate) a pr�c�d� les syndicats et a cr�� ces derniers. Maintenant, les syndicats d'une part, l'Etat ouvrier de l'autre, sont chez nous enti�rement sous l'influence et la direction du parti communiste, qui n'a pas surgi des syndicats, mais qui, au contraire, les a cr��s et les a form�s id�ologiquement. Louzon voudrait‑il affirmer par hasard que la Russie s'est d�velopp�e contrairement aux vues de Marx ? N'est‑il pas plus simple de dire que les paroles de Marx sur l'origine syndicale du parti sont, comme l'a montr� l'exp�rience, applicables � l'Angleterre, et encore jusqu'� un certain point seulement, mais ne sont nullement ce que Marx appelait, avec m�pris, la loi � supra‑historique � ?
Tous les autres pays de l'Europe, y compris la France, se placent, dans la question qui nous int�resse, entre la Grande‑Bretagne et la Russie. Dans certains pays, la naissance des syndicats a pr�c�d� celle du parti, dans d'autres, au contraire, c'est le parti qui est apparu le premier ; mais en tout cas, nulle part sauf en Angleterre, et partiellement en Belgique, le parti du prol�tariat n'a surgi des syndicats. En tout cas, aucun parti communiste n'a surgi � organiquement � des trade‑unions. Allons‑nous, pour cela, traiter toute l'Internationale communiste d'� enfant naturel � ?
Lorsque les trade‑unions anglaises soutenaient tour � tour les partis conservateur et lib�ral, dont elles �taient l'appendice ouvrier [3], lorsque l'organisation politique des ouvriers allemands repr�sentait encore la gauche du parti d�mocrate et que les partisans de Lassalle et d’Eisenach se livraient une lutte acharn�e, Marx revendiquait l'ind�pendance des syndicats � l'�gard de tout parti. Cette formule �tait dict�e par le d�sir d'opposer l'organisation ouvri�re � tous les partis bourgeois ou aux sectes socialistes. Mais Louzon n'aura pas oubli� que Marx a fond� la I� Internationale, qui avait pour t�che de diriger et de f�conder les mouvements ouvriers de tous les pays sous tous les rapports. Cela se passait en 1864, mais l'Internationale de Marx �tait un parti. Donc Marx n'avait pas attendu que le parti international de la classe ouvri�re surg�t (arbitrairement ?) des trade‑unions. Il faisait tout pour assurer dans les trade-unions l'influence des id�es du socialisme scientifique, id�es exprim�es pour la premi�re fois en 1847, dans le Manifeste du parti communiste. S'il exigeait l'ind�pendance compl�te des trade‑unions, des syndicats, etc., � l'�gard de tous les partis et sectes existants, c'est�‑dire de tous les partis et sectes bourgeois et petits‑bourgeois, c'�tait pr�cis�ment pour assurer plus facilement dans ces organisations la domination des id�es du socialisme scientifique. Marx, �videmment, n'avait jamais song� � voir dans le parti du socialisme scientifique un des partis politiques existants (parlementaires, d�mocratiques, etc.). L'Internationale �tait, pour Marx, la classe ouvri�re m�me arriv�e � la conscience d'elle‑m�me, en la personne de son avant-garde, alors encore tr�s peu nombreuse.
Si Louzon avait voulu �tre cons�quent dans sa m�taphysique syndicale et tenace dans son interpr�tation de Marx, il aurait d�. dire : � Enterrons le parti communiste autonome et attendons que ce parti naisse des syndicats. � Une telle logique serait mortelle, non seulement pour le parti, mais aussi pour le syndicat. En effet, les syndicats fran�ais actuels ne pourront restaurer leur unit� et obtenir une influence d�cisive sur les masses si leurs meilleurs �l�ments ne se groupent pas en une avant‑garde r�volutionnaire consciente de la classe ouvri�re, c'est‑�‑dire dans le parti communiste. Marx n'a pas donn� et ne pouvait donner de r�ponse universelle � la question de la nature des rapports organiques entre le parti et les syndicats. Quels doivent �tre ces rapports, cela d�pend � chaque moment donn� de facteurs et de circonstances diff�rents. Qu'il existe une repr�sentation r�ciproque du parti et de la conf�d�ration, ou que ces organisations constituent au fur et � mesure du besoin un comit� d'action c'est l� une question qui n'a pas une importance essentielle. Les formes d'organisation peuvent varier, mais le r�le fondamental du parti reste immuable. Le parti, s'il m�rite ce nom, groupe l'avant‑garde de la classe ouvri�re et f�conde par son influence id�ologique toutes les branches du mouvement ouvrier et, en premier lieu, les syndicats. Ces derniers, s'ils m�ritent ce nom, groupent une masse sans cesse croissante de la classe ouvri�re, y compris ses �l�ments arri�r�s. Mais ils ne peuvent s'acquitter de cette tache qu'avec une direction juste, raisonn�e, bas�e sur des principes d�termin�s. Or, ils ne peuvent avoir cette direction que si l'�lite des syndiqu�s est group�e dans le parti de la r�volution prol�tarienne.
L'�puration qui a eu lieu ces derniers temps dans le parti fran�ais et qui l'a d�barrass� des petits‑bourgeois pleurards, des beaux parleurs, des Hamlets politiques et des arrivistes, ainsi que le rapprochement du parti et des syndicalistes r�volutionnaires, repr�sentent un grand pas en avant vers l'instauration de rapports justes entre l'organisation syndicale et l'organisation politique de la classe ouvri�re. Et cela est, par suite, d'un grand profit pour la r�volution.
Notes
[1] Monatte et Louzon, syndicalistes r�volutionnaires, �taient � cette �poque membres du P.C. Ils devaient suivre ult�rieurement c�te � c�te le m�me itin�raire et se retrouver dans le noyau de la R�volution prol�tarienne. Trotsky avait provisoirement mis de c�t� ses divergences avec Monatte pour concentrer ses efforts dans la lutte contre Frossard.
[3] Les syndicats am�ricains, aujourd'hui encore, n'ont pas d�pass� ce stade et monnaient leur soutien �lectoral alternativement aux d�mocrates et aux r�publicains. Le mot d'ordre d'un Labor Party reposant sur les syndicats n'a �t� mis en avant aux Etats‑Unis que par des r�volutionnaires.
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