"(...) le prolétariat mondial, le prolétariat de chaque pays, abordent une étape décisive de leur histoire : il leur faut reconstruire entièrement leur propre mouvement. La crise du stalinisme (...) s'ampliie au moment où le mode de production capitaliste pourrissant s'avance vers des convulsions mortelles, qui riquent d'entrainer l'humanité toute entière dans la barbarie. (...) De cette crise des appareils naissent les possibilités de reconstruire la IV° Internationale." |
Défense du trotskysme (3)
La voie froide coupée, révolution et contre-révolution à l'ordre du jour
Après qu'ils aient caractérisé la politique des revenus, les tentatives d'intégration des syndicats à l'Etat bourgeois, le recours au pouvoir fort, comme expressions du besoin de la bourgeoisie de planifier la croissance des salaires et l'amélioration des conditions de travail, il n'est pas étonnant que les renégats de la IV° Internationale voient d'une façon très particulière les attaques des bureaucraties parasitaires contre le prolétariat et les mouvements révolutionnaires qui se sont développés en Europe de l'Est :
« Avant de dire quelques mots sur la nature et le sens des réformes économiques proposées par Ota Sik, il nous faut signaler un point important : au niveau politique la Tchécoslovaquie n'avait pas connu le XXe Congrès et donc les aspects les plus hideux du stalinisme y subsistaient. En Pologne et en Hongrie le mouvement révolutionnaire des masses de 1956 a permis la disparition des formes disons les plus choquantes de la domination stalinienne » (souligné par moi). (L'intervention en Tchécoslovaquie, pourquoi ? Cahiers rouges N° 5, page 18).
Ils ajoutent en note en bas de page :
« Une question simple à laquelle les staliniens n'ont jamais été capables de répondre est la suivante : vous dites qu'en Hongrie, en 1956, c'était la contre révolution ; soit, mais vous dites aussi - maintenant que la clique Rakosi Geroe faisait régner une véritable terreur policière sur l'ensemble de la société. Existait il un autre moyen que l'insurrection armée pour mettre ces individus hors d'état de nuire ? Y avait il des possibilités réelles, par le jeu démocratique, d'y arriver ?
On touche là un point essentiel, que l'affaire Tchécoslovaque révélera : l'incapacité de la bureaucratie des démocraties populaires à l'auto réforme, dans un sens qui lui serait pourtant historiquement plus favorable, sans mobilisation des masses. »
Souvenons nous qu'en 1956, à propos du mouvement révolutionnaire en Pologne, comparé à la révolution hongroise, les renégats de la IV° Internationale écrivaient :
« En Pologne, grâce au rôle de direction qu'a pu jouer le Parti Ouvrier (le parti stalinien) conquis, transmuté par la tendance Gomulka expression elle même, certes déformée, de la vraie tendance des masses, mais tendance centriste évoluant tout de même à gauche la révolution politique des masses contre le régime bureaucratique a pu faire l'économie d'un errement dans l'incertitude et la confusion, éviter les dangers inhérents à une telle situation. » (Quatrième Internationale, Vol. 14, N° 10 12, décembre 1956, page 6).
Par contre :
« En Hongrie, l'absence de toute direction politique centralisée et tant soit peu claire a provoqué au contraire, à partir d'un certain moment, exactement ces défauts et ces dangers.
Le manque de direction révolutionnaire consciente ayant des racines parmi les masses a fait que la situation révolutionnaire exceptionnellement favorable des premiers jours, avec partout la création de comités dominés par le courant prolétarien, n'a pu être exploitée afin d'asseoir sur eux tout le pouvoir, et de définir un programme de politique extérieure qui serait sinon acceptable du moins difficile à combattre par le Kremlin.
Au contraire nous avons vu les éléments disparates du gouvernement Nagy, dont une bonne partie étaient des éléments éduqués dans la confusion et l'opportunisme stalinien, hésiter, abandonner successivement leur politique antérieure, élargir la démocratisation dans tous les sens, donner des prétextes au Kremlin, sinon l'alarmer effectivement.
Débordé, le gouvernement Nagy a commencé à manœuvrer au dehors du camp de classe, sans avoir essayé au contraire de manœuvrer face au Kremlin, à l'intérieur de ce camp...
Une véritable direction révolutionnaire qui aurait fait appel aux comités et aux courants prolétariens des masses avec sincérité, avec audace aussi, aurait pu les convaincre de comprendre les limites de classe de la démocratisation et la nécessité de l'alliance sur un pied d'égalité avec l'U.R.S.S. » (Idem pages 6 et 7).
Les apologistes de Gomulka condamnent Imre Nagy ; tout est en ordre. Selon eux, Gomulka qui agissait au compte des intérêts de la bureaucratie pour contenir et dévier le mouvement des masses devait être soutenu, il était « dans leur camp de classe » ; par contre Imre Nagy qui avait résolument rompu avec la bureaucratie et s'était mis au service du prolétariat, même si c'est avec confusion, et qui paya de sa vie cette prise de position, se situait en dehors de « leur camp de classe ».
Tout est bien clair, les bureaucraties satellites et évidemment bien sûr la bureaucratie du Kremlin, ont le pressent besoin « historique » de « s'auto réformer », mais elles sont incapables de le faire par elles même. Les bureaucraties parasitaires ont besoin de la mobilisation des masses pour s'auto réformer dans un sens qui leur soit historiquement favorable. La tâche est alors, qu'on l'avoue ou non, d'obtenir cette « auto réforme » de la bureaucratie, et les limites des mouvements révolutionnaires sont du même coup toutes tracées. Elles sont celles que, par exemple, en Pologne, Gomulka parvint à fixer. Elles sont celles que, après l'intervention militaire de la bureaucratie. du Kremlin, Kadar imposa en Hongrie. Une première idée, qui est une constante du révisionnisme, qu'il soit celui des renégats à la IV° Internationale ou de tout autre courant, se dégage : la pérennité des bureaucraties parasitaires.
« La mobilisation révolutionnaire des masses » féconde la bureaucratie, lui permet de dépasser les limites qu'elle serait incapable de dépasser de son propre mouvement. Elle est un élément de la « démocratisation ». D'ailleurs « historiquement, l'hégémonie de la bureaucratie provient d'une délégation du pouvoir de la classe ouvrière à une couche de « professionnels du pouvoir ». C'est donc une forme de la division du travail. Sous cet aspect une certaine forme de bureaucratisation est inévitable.
Mais en U.R.S.S., la forme extrême du stalinisme, la bureaucratie s'est détachée du prolétariat, pour défendre les siens propres. Si nous appelons l'U.R.S.S. état ouvrier, c'est parce que le groupe qui détient le pouvoir en U.R.S.S. l'exerce sur la base des rapports de production instaurés en Octobre 1917 et que sa survie est liée au maintien de ces rapports. » (L'intervention en Tchécoslovaquie, pourquoi ? Cahiers rouges, N° 5, page 12).